Ce dimanche 1er juin 2025, le Centre KATE à Kotto-Douala a accueilli un atelier autour des archives historiques du Kamerun détenues au Musée ethnographique de Berlin. Porté par le projet MWANO Transforming Memories, cet événement a réuni artistes, chercheurs, étudiants et membres de la communauté camerounaise pour un moment de réflexion collective sur la mémoire coloniale et sa réappropriation.
L’objectif ? Offrir un nouveau regard sur les archives photographiques et sonores issues de la période coloniale allemande, longtemps restées silencieuses, voire déformées. Ces images, aujourd’hui souvent réinterprétées par des artistes et des intellectuels, servent désormais de base à une réflexion sur l’identité, la résistance et la guérison.
« Le projet, c’est que les Camerounais puissent avoir accès à ces images. (…) On a compris que les archives ne sont pas juste à enfermer dans des armoires. Ce sont des outils que nous pouvons utiliser, que ce soit avec les artistes ou avec les chercheurs »,
a expliqué Augustine Moukodi, coordinatrice du projet. En effet, pour elle, permettre aux étudiants, chercheurs, artistes de s’inspirer de ces images est un grand pas vers le dépassement de cette période.
Décoloniser le regard, reconnecter l’humain
L’événement s’est structuré autour de cinq panels abordant les migrations, les dynamiques des peuples, les traditions, la condition humaine, et le rôle fondamental des femmes dans les sociétés précoloniales. Par ailleurs, Il a permis de déconstruire les images imposées et de réaffirmer les vérités culturelles camerounaises.
« C’est le regard de l’autre qui a fait que la femme a été réduite à un objet. Mais en tant que chercheur, il faut le dire et le redire. Ce que nous savons de nos traditions, pas la façon dont nous avons été vus, mais ce que nous savons de notre propre tradition et que nous devons redécouvrir, c’est que la femme c’est un véritable pilier, c’est un des piliers de la société. Ce sont les femmes qui s’arrangeaient pour que l’équilibre règne au sein de la société. Donc, c’est très important de revoir ces images, parce que ça nous montre le décalage, ça nous montre le chemin que nous avons à reparcourir pour renouer avec ce qui constitue l’essence de notre société. »,
a déclaré Marianne Ballé Moudoumbou, interprète de conférence, enseignante-chercheure et artiste, intervenante dans le projet.
Enfin, une interrogation a clos les échanges : “L’être humain tel qu’il est perçu aujourd’hui répond-il encore aux principes de la création d’antan ?”
Cette question ouvre la voie à un travail de reconnexion profonde entre l’humain et ses racines culturelles. Ainsi, à travers trois grandes étapes lecture artistique des archives, restitution en 2026, et exposition en 2027 en Allemagne et au Cameroun, le projet MWANO ambitionne de reconstruire une mémoire partagée, libre et guérie.
Ronel Tedeffo