À 168 cm, beaucoup lui prédisaient un plafond. Marie Tina Mbouombouo en a fait un tremplin.
Réceptionneuse-attaquante explosive, libéro par polyvalence, internationale camerounaise précoce, la jeune volleyeuse est l’une de ces joueuses dont le parcours raconte tout : la résistance, le travail, la douleur… mais surtout la conviction farouche que le talent finit toujours par faire taire les doutes.
Née le 20 septembre 2006 à Bafoussam, elle découvre le volley sur les terrains poussiéreux du lycée bilingue de la ville. Elle y apprend le premier geste, la première manchette, la première montée au filet. Très vite, elle accompagne « les grandes » en compétition ; elle observe, elle absorbe, elle imite. Puis elle s’impose.
2018 marque son véritable passage à l’échelle nationale : championne du Cameroun en catégorie cadette avec les Brandy.

L’année suivante, elle découvre la sélection nationale. Stage brillant, mais liste finale sans son nom. Premier choc. « Papa m’a dit : concentre-toi sur le probatoire, tu seras libre après avoir ton bac », raconte-t-elle. Et papa, c’était Tongtong Siewe Emile, légende du volley-ball camerounais, entraîneur, modèle, et phare de sa carrière.
Elle passe le probatoire. Puis une nouvelle liste tombe en 2020 : encore non retenue. Prétexte : « trop petite ».
Elle pleure. Papa répond : « Tout ce que Dieu fait est bon ».
Elle se relève. Et elle travaille.
Travaille son timing d’attaque, sa lecture défensive, sa gestion des trajectoires rapides, son stabilisateur de réception, son toucher de balle. Elle apprend à compenser la taille par l’explosivité, à transformer chaque saut en argument, chaque défense en signal.
À 16 ans, elle décroche son baccalauréat. Deux jours plus tard, elle est appelée pour la CAN 2020.
Stage réussi. Liste validée. Elle court annoncer la nouvelle à son père. Il sourit. Il sait déjà.

Mais il ne part pas avec l’équipe. Problèmes de santé. Le début d’un combat qu’elle ne comprendra que plus tard.
Après la CAN, elle prend la direction de Yaoundé pour continuer ses études et se rapprocher des clubs majeurs. Elle enchaîne les saisons en multipliant les responsabilités : vice-championne avec Mayo Kani, Mondial U19, Championnat d’Afrique, puis retour à Douala pour se relancer avec Litto Team.
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Résultat : titre de championne du Cameroun 2025, vainqueur de la Coupe du Cameroun, championne de la zone 4 africaine, vice-championne d’Afrique U20, et une moisson régulière de médailles avec l’Université de Yaoundé I.
Sur le terrain, Marie Tina est une pièce rare :
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réception solide, bras verrouillés, angle maîtrisé ;
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défense au sol rapide, lecture précoce, anticipation souvent décisive ;
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attaque ligne/croisé à grande vitesse malgré une taille modeste ;
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intelligence de jeu précieuse, cette capacité à orienter la transition dès le premier contact ;
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polyvalence poste pour poste, capable d’assurer en libéro comme en réceptionneuse-attaquante ;
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mental de fer, forgé dans les sélections manquées, les doutes sur sa taille, et la mémoire d’un père-coach qui l’a guidée jusqu’à son dernier souffle.
En 2023, elle représente le Cameroun au Championnat du monde Croatie–Hongrie.
Par ailleurs, en 2024, elle enchaîne une double vice-championne de la Coupe du Cameroun et une vice-championne d’Afrique à Abuja.
En 2025, elle monte encore d’un niveau, cumulant titres, sélections et responsabilités.
Aujourd’hui, à 19 ans, elle porte le maillot national avec la même flamme qu’à ses débuts, mais avec une maturité nouvelle. L’héritage de son père, le défunt coach international Siewe Emile, n’est pas un poids. C’est un moteur.
Et son rêve n’a rien d’un caprice d’adolescente : évoluer dans les meilleurs clubs du monde et faire briller encore plus haut les Lionnes Indomptables.
Elle sait que le chemin est long.
Mais elle sait aussi, mieux que quiconque, que sa carrière n’a jamais obéi aux pronostics.
Marie Tina Mbouombouo n’est pas grande.
Elle est immense.
WILFRIED NGOMSEU







