Depuis plusieurs années, les tensions entre les rappeurs Booba et Gims étaient devenues un feuilleton bien connu des fans de rap français. Mais en 2024, ce qui n’était qu’un “clash artistique” s’est transformé en affaire judiciaire : Gims et sa compagne DemDem ont porté plainte pour harcèlement moral et cyberharcèlement contre Booba. En octobre 2025, ce dernier a été mis en examen. La rédaction de SCN vous plonge dans une affaire explosive qui soulève de nombreuses questions.
Un conflit ancien devenu personnel
Le conflit entre Gims (Gandhi Djuna) et Booba (Élie Yaffa) n’a rien de nouveau. Il remonte à plusieurs années, ponctué d’échanges piquants, de provocations sur les réseaux sociaux et de paroles ciblées dans certains morceaux. Booba, connu pour ses clashs contre de nombreuses personnalités (Rohff, Kaaris, Maes, etc.), n’a jamais épargné Gims, qu’il accuse régulièrement de “trahir” les valeurs du rap ou de “surjouer” son personnage public.
Mais ce qui n’était au départ qu’une rivalité entre artistes a pris une toute autre tournure à la fin de l’été 2024, quand Gims et sa compagne DemDem ont décidé de saisir la justice.
La plainte : du clash au harcèlement
Le 30 août 2024, Gims et DemDem déposent une plainte pour “harcèlement moral et cyberharcèlement” auprès du parquet de Paris. Ils accusent Booba de s’en prendre à eux de manière répétée et publique, via des publications sur les réseaux sociaux, des vidéos, des interviews et même des morceaux de musique.
Les faits reprochés couvriraient une période allant d’avril 2018 à fin 2024, soit plus de six ans d’agissements jugés “dégradants et déstabilisants”, notamment à l’encontre de DemDem, compagne de Gims et influenceuse.
Parmi les éléments cités dans la plainte :
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Des publications humiliantes sur Instagram et X (ex-Twitter), parfois plusieurs par semaine.
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Des insultes à répétition, ciblant leur physique ou leur vie de famille.
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L’usage de termes comme “sorcière”, “pondeuse”, “catin” ou “croquette pour chat” à l’encontre de DemDem.
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Une vidéo de Booba l’impliquant de façon sexiste.
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Et surtout, les paroles de la chanson Dolce Camara, sortie en février 2024, dans laquelle Booba dit : « On les aime fraîches, bien michtos… qui savent accueillir comme DemDem ». Une allusion directe, perçue comme un “point de rupture” par la plaignante.
Mise en examen de Booba
Le 15 octobre 2025, Booba est placé en garde à vue à Paris, puis mis en examen le lendemain pour “harcèlement moral en ligne ayant causé une incapacité de travail supérieure à huit jours”.
Une mesure d’éloignement lui est imposée : il lui est désormais interdit d’entrer en contact avec DemDem ou de publier tout contenu la mentionnant.
Booba nie les accusations. Ses avocats dénoncent une atteinte à la liberté d’expression artistique, estimant que les publications incriminées relèvent du second degré ou de la satire :
“Il serait extrêmement dangereux que des créations musicales ou des blagues en ligne soient pénalement réprimées comme du harcèlement moral. Ce serait la fin de la liberté artistique.”
Un procès à venir ?
Le dossier suit désormais son cours. Un procès est possible en 2026 si la mise en examen est confirmée par le juge d’instruction. Booba risque jusqu’à trois ans de prison et 45 000 € d’amende si les faits sont reconnus.
Pour Gims et sa compagne, il s’agit de “faire cesser des attaques constantes” et de “protéger leur famille”. Pour Booba, le combat continue aussi sur le terrain médiatique : il reste actif sur ses réseaux, même s’il évite désormais de mentionner directement DemDem.
Cette affaire marque sans doute un tournant dans le paysage du rap francophone. Longtemps tolérés ou ignorés, les clashs publics trouvent aujourd’hui des limites juridiques. L’image des artistes est désormais scrutée, et leurs paroles peuvent avoir des conséquences légales.
Au-delà de la rivalité entre deux figures du rap, c’est la manière de communiquer, de critiquer et d’exister publiquement qui est remise en question. L’issue de cette affaire pourrait redéfinir la frontière entre la liberté d’expression et le devoir de respect, même dans un milieu aussi provocateur que le rap.
Affaire à suivre…
Japhet Mbakop Tchagha