Une récente publication de Narcisse Wandji, réalisateur et producteur camerounais, a provoqué une vive controverse sur la toile. Si les réactions sont diverses, nombreux sont ceux qui contestent ses propos. Cette intervention a ravivé une problématique majeure : le sous-financement persistant dans l’industrie cinématographique camerounaise.
« Faire du cinéma n’a jamais été aussi facile. Non, mais on est où, là ? Prenons du temps pour bien faire les choses. C’est quoi ces films fast-food ? Arrêtez ça ! »
Tels sont les propos tenus par le réalisateur et producteur camerounais ce jeudi 29 mai. Une déclaration qui n’est pas passée inaperçue. Plusieurs internautes y voient un manque de solidarité envers les créateurs confrontés à des réalités économiques difficiles.
Le manque de moyens pointé du doigt
« Ce n’est pas ces cinéastes qu’on doit blâmer, mais le système en place qui ne les accompagne pas comme dans d’autres pays. Étant des passionnés de ce métier, plutôt que de crever de faim, ils font avec les moyens du bord », a réagi l’actrice et productrice Rachel Nkontieu.
Même son de cloche du côté du réalisateur Ghislain Towa, qui pose des questions clés :
« Combien de bons films sortent au Cameroun par an ? Combien de réalisateurs de ces bons films vivent pleinement de leur art ? On est tous d’accord, mais il faut aussi comprendre que tout le monde n’a pas les moyens que vous avez pour faire les bons films. »
Rachel Nkontieu et Ghislain Towa défendent les cinéastes qui créent malgré le manque de moyens. Pour eux, le vrai problème est un système peu soutenant. Ils rappellent que beaucoup travaillent avec passion, sans financement, et que tous n’ont pas les mêmes ressources pour produire des films de qualité.
Un plaidoyer en faveur des cinéastes de terrain
Francis Tene K., réalisateur de renom, défend fermement ceux qui produisent avec peu ou pas de moyens :
« À tous ces producteurs et réalisateurs qui, depuis des années, continuent de créer des films sans financement, qui parviennent pourtant à remporter des prix face à des œuvres financées : vous êtes la preuve vivante que la passion, la persévérance et la créativité sont les fondements réels de notre cinéma. »
Il lance également un appel fort aux institutions telles que l’OIF, Canal+, TV5 Monde, les ministères, et autres partenaires :
« Ce dont nous avons besoin, ce ne sont pas uniquement des subventions à projet, mais d’une véritable politique d’équipement en salles de cinéma. Une industrie ne se développe pas sans un public local. Encourageons aussi le cinéma “fast-food”, celui qui nourrit notre peuple aujourd’hui. »
Soulevant à la fois des frustrations et des espoirs, cette polémique révèle une fois de plus l’urgence de repenser les bases de l’écosystème cinématographique camerounais.
Suite à la réponse tranchée de son collègue Francis Tene K., Narcisse Wandji a tenu à clarifier sa position. Pour lui, le vrai problème n’est pas le manque de moyens, mais le manque d’exigence. Il estime qu’on ne peut pas justifier la médiocrité sous prétexte de débrouillardise. Selon lui, même avec peu, on peut chercher à bien faire, et il appelle les cinéastes à viser l’excellence, quelle que soit leur situation financière.
Il rappelle aussi que l’obtention de financements est une démarche compétitive et mérite respect, et que ceux qui y parviennent participent activement au rayonnement du cinéma camerounais. Enfin, il souligne que le problème de la distribution touche tous les films, financés ou non, et insiste sur la nécessité de produire des œuvres de qualité pour espérer une vraie visibilité.
Elsa Daniele Monti