Alors que les tensions entre rappeurs camerounais enflamment régulièrement les réseaux sociaux, un phénomène semble se dessiner : celui d’une utilisation stratégique du clash comme outil de communication.
Derrière les piques, les provocations et les prises de position virulentes, certains artistes profitent de cette effervescence médiatique pour annoncer de nouveaux projets, attirer l’attention et renforcer leur visibilité. À mi-chemin entre confrontation et marketing, le clash s’impose de plus en plus comme une composante de la dynamique promotionnelle du rap camerounais.

Maahlox et Jovi : la rivalité s’exprime aussi sur le terrain scénique
Dans une récente publication, Maahlox a évoqué un possible concert en ces termes :
« 15 ans de succès dans tous les Ndjoka, on danse mes sons depuis ‘La bière c’est combien ici ?’, ‘Ça sort comme ça sort’… Je crois que je peux remplir l’une des salles ici. » . Une déclaration qui, tout en rappelant la longévité de sa carrière, semble aussi répondre aux critiques sur sa capacité à remplir de grandes salles, au Cameroun comme à l’étranger. Les références aux salles prestigieuses telles que le Casino de Paris, le Trianon ou La Cigale renforcent cette ambition, bien qu’aucune date n’ait encore été officialisée.
De son côté, Jovi a également annoncé la tenue prochaine de deux concerts en 2025 : l’un au Palais des Sports de Yaoundé, l’autre au Canal Olympia de Douala. « Je suis en train d’organiser deux concerts pour 2025 […] Bientôt, je vous annonce les dates. » . Là encore, peu de détails pour l’instant, mais une volonté manifeste d’occuper le terrain médiatique et de se projeter comme un artiste de grande envergure.
Bien que ces annonces n’aient pas été explicitement rattachées aux échanges tendus ou clashs récents, la simultanéité des déclarations laisse entrevoir une stratégie commune : celle de capter l’attention en période de tension pour mieux affirmer son statut.

Un clash devenu stratégie de visibilité dans le rap camerounais ?
Au-delà des figures établies comme Jovi ou Maahlox, d’autres artistes semblent également tirer parti de ce climat. C’est notamment le cas de Sojip, jeune rappeur dont la notoriété, jusque-là plus discrète, a connu un essor récent grâce à sa punchline percutante dans le titre Log(1).
Ce morceau plutot bien accueilli sur les plateformes et dans les discussions autour des beefs récents, lui a permis de s’imposer comme une voix montante du rap camerounais, en profitant du contexte global de rivalité et de compétition. Là où d’autres clashent pour maintenir leur image, lui s’est glissé dans la brèche pour exister, prouvant que même dans l’ombre des grands noms, une stratégie bien menée peut porter ses fruits.
Pour les rappeurs camerounais, entretenir ou rejoindre une polémique devient parfois un moyen de se repositionner, de rappeler leur présence ou de préparer un projet à venir. Une réalité qui, loin d’être propre au Cameroun, reflète l’évolution du rap comme culture mais aussi comme industrie.
Elsa Daniele Monti