Depuis son arrivée à la tête des Lionnes Indomptables en août 2023, Jean-Baptiste Bisseck n’a jamais trouvé la formule magique. Dix matchs plus tard, le constat est sans appel : trois victoires, six défaites et un nul. Un bilan famélique, symbole d’une équipe à la dérive, et d’un sélectionneur qui n’a jamais su donner une âme à son groupe.
Des débuts fragiles et des doutes persistants
Sa nomination, le 18 août 2023, avait déjà soulevé de nombreuses interrogations. L’ancien coach de Coton Sport de Garoua, auréolé de quelques succès en club, arrivait dans un univers qu’il ne maîtrisait pas : celui du football féminin. Sans véritable expérience dans ce domaine, il prenait les rênes d’une équipe en perte de repères, fraîchement éliminée du Mondial. Beaucoup y voyaient un pari risqué. Un an plus tard, les faits donnent raison aux sceptiques.

Les premiers signes de déclin
Son premier grand test face au Kenya devait être une formalité. À Douala, les Lionnes s’imposent difficilement à l’aller, avant de s’effondrer au retour.
Résultat : élimination dès les préliminaires, et un vent de désillusion qui s’abat sur tout le pays. Pour la première fois depuis plus d’une décennie, le Cameroun manquait la CAN féminine. Un revers que beaucoup avaient alors qualifié d’accident. Mais la suite a prouvé que c’était bien le début d’un déclin structurel.
Des promesses sans lendemain
Reparti pour un nouveau cycle, Bisseck promettait de « reconstruire » et de « redonner une identité de jeu » à l’équipe. Mais entre discours et réalité, le fossé n’a cessé de se creuser.
Lors de la campagne qualificative pour la CAN 2026, le Cameroun s’est encore heurté à ses vieux démons :
manque de cohérence tactique, transitions désordonnées, incapacité à convertir les occasions, et surtout, une absence criante de plan offensif.
À Oran, les Lionnes s’inclinent 2-1 face à une Algérie disciplinée. Au retour, à Bepanda, le même scénario se répète : domination stérile, maladresse technique et fébrilité mentale. Les Fennecs, bien en place sous la houlette de Farid Benstiti un promotionnaire de Bisseck à l’école des entraîneurs , ont su bâtir une structure claire, patiente et efficace. Pendant que l’Algérie construisait, le Cameroun, lui, parlait encore de reconstruction.

Une gestion contestée
Le revers face à l’Algérie a ouvert la boîte de Pandore. Au-delà du résultat, c’est le comportement du sélectionneur qui a choqué. En conférence de presse d’après-match, Jean-Baptiste Bisseck s’est montré condescendant, détaché, presque provocateur :
« Quel entraîneur peut sauter sur les tables avec un sourire après avoir perdu une qualification ? L’entraîneur ne joue pas, il fait son travail. Si vous pensez que c’est moi le problème, prenez ma place et vous verrez. »
Des propos qui ont glacé la salle et scandalisé les observateurs. Au lieu d’assumer la responsabilité de l’échec, Bisseck a préféré se dédouaner, rejetant la faute sur les joueuses et sur la fatalité.
Une attitude perçue comme un aveu d’impuissance, voire de mépris, dans un moment où le pays attendait humilité et lucidité.
Les chiffres d’un naufrage
Sous sa direction, les Lionnes n’ont jamais trouvé leur équilibre :
10 matchs officiels
3 victoires
6 défaites
1 nul
12 buts encaissés, 7 marqués.
Des chiffres qui parlent d’eux-mêmes. À cela s’ajoute une instabilité dans les compositions, des choix déroutants, et une absence de continuité dans le travail collectif. Les cadres historiques comme Aboudi Onguéné, Falonne Meffometou ou Nchout Ajara peinent à retrouver leur influence, pendant que la relève manque d’encadrement.
Un leadership en panne
Jean-Baptiste Bisseck se voulait bâtisseur. Mais au fil des mois, il est devenu l’architecte d’un projet sans plan. Les Lionnes Indomptables ont perdu leur identité : ni rigueur défensive, ni créativité offensive, ni mental de conquérantes. Le mot « reconstruction » est devenu un slogan creux. Et pendant ce temps, les nations voisines avancent, structurent, innovent.
L’heure des décisions
Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir si le Cameroun doit changer de cap, mais quand. Le maintien de Bisseck à la tête des Lionnes apparaît de plus en plus intenable.
Ses résultats, ses discours et son comportement traduisent une rupture avec l’esprit même de cette équipe : le courage, la discipline et la combativité.
Le Cameroun vient de manquer une deuxième CAN consécutive, et avec elle, les portes du prochain Mondial.
Une page se tourne. Mais la suivante ne pourra s’écrire qu’avec une nouvelle vision, un encadrement solide, et un vrai projet de relance du football féminin.
Parce qu’au-delà de Bisseck, c’est tout un système qui vacille. Et tant que les réformes resteront au stade des discours, le rugissement des Lionnes restera un écho du passé.
WILFRIED NGOMSEU







